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Les semi-conducteurs, ces composants qui alimentent la plupart des appareils, des téléphones mobiles aux réfrigérateurs en passant par les voitures, ont dorénavant un réel impact économique et technologique. En effet, leur pénurie actuelle est à l’origine d’une grande partie des hausses de prix aux Etats-Unis. Une situation qui met en évidence des problèmes plus étendus dans la chaîne d’approvisionnement, au moment où les consommateurs ouvrent leur porte-monnaie dans une frénésie de dépenses post-pandémie.
Pendant plus d’une décennie, les responsables de la politique monétaire se sont demandé où était passée l’inflation. Depuis avril, elle a augmenté aux Etats-Unis alors que le pays est sorti de la crise et que les consommateurs ont commencé à dépenser leur épargne. L’inflation des prix à la consommation y a grimpé de 0,9% au cours du seul mois de juin, portant sa hausse annuelle à 5,4% par rapport à l’année précédente. Sur une base annualisée, l’inflation du mois dernier serait la plus élevée depuis trois décennies. Nos calculs suggèrent que l’inflation américaine restera élevée jusqu’à fin 2021, atteignant un pic en novembre et décembre, avant de baisser en 2022 (cf. graphique 1).
Pénurie de puces à semi-conducteurs
La reprise des dépenses en billets d’avion, hôtels et restaurants est une conséquence naturelle de la réouverture des économies et explique aussi une partie de la pression sur les prix. Le reste est dû à la demande de véhicules neufs et anciens. La reprise de la demande et la pénurie de puces à semi-conducteurs ont provoqué une augmentation de 34,3% des prix des véhicules d’occasion sur douze mois, et de 18% des prix des voitures neuves durant la même période.
Le secteur automobile est sensible à l’offre de semi-conducteurs. Une voiture neuve contient en moyenne 1’400 semi-conducteurs, utilisés dans toutes les fonctionnalités, des capteurs de stationnement au régulateur de vitesse en passant par les écrans tactiles, tandis que les véhicules hybrides ou électriques peuvent nécessiter jusqu’à 3’500 puces. La pénurie de semi-conducteurs a contraint les constructeurs automobiles, dont Ford Motor Company, à ralentir leur production.
Cela prend des mois pour augmenter les capacités de production de semi-conducteurs et leur fabrication est hautement concentrée. Les trois quarts de l’offre mondiale proviennent de Chine et d’Asie de l’Est, tandis que la production des puces les plus sophistiquées est encore plus concentrée, avec 92% d’entre elles fabriquées à Taïwan et le reste en Corée du Sud.
Pas universel
Rien n’indique, selon nous, que les facteurs à l’origine de cette poussée inflationniste soient en train de se propager à d’autres secteurs de l’économie ou à d’autres pays. Une inflation persistante serait visible partout. Pour l’instant, l’inflation se limite à des secteurs spécifiques aux Etats-Unis, et se normalise dans les autres marchés autour de la planète (cf. graphique 2).
Ni la Chine ni Israël, deux pays avancés dans leur reprise économique, n’expérimentent de pics d’inflation. En Israël, l’inflation des prix à la consommation était de 1,5% en mai, et en Chine de 1,7% le mois dernier. L’inflation chinoise ne reflète peut-être pas encore les efforts du gouvernement pour passer de son modèle économique historique axé sur la production industrielle à une économie basée sur les dépenses de consommation. Si les entreprises chinoises subissent des augmentations de coûts liées aux prix des matières premières, elles ne les répercutent pas encore sur les consommateurs.
Les stocks mondiaux, l’offre de matières premières et la logistique sont faibles dans tous les secteurs, de l’acier au coton en passant par le bois et les conteneurs maritimes. Une situation qui pourrait provoquer de nombreux goulets d’étranglement économiques à court terme, qui expliquent la hausse des prix. Toutefois il n’existe pas de pénurie fondamentale en matière de capacité mondiale pour répondre à la reprise de la demande. Cela suggère que les approvisionnements peuvent et vont se rétablir, ce qui limitera la hausse de l’inflation.
Objectifs et ripostes monétaires
Sur les autres marchés, l’inflation sous-jacente reste en deçà des objectifs des banques centrales. Dans la zone euro, l’inflation des prix à la consommation était de 0,9% en juin, tandis qu’en Suisse et au Japon, elle était encore plus faible, s’établissant à 0,3% et -0,3% respectivement.
Suite au passage de la Fed à un ciblage de l’inflation sur le moyen terme, la Banque centrale européenne (BCE) a également modifié ses objectifs le mois dernier. La BCE a ainsi remplacé son objectif d’un niveau d’inflation « inférieur mais proche de 2% » par une cible « d’inflation symétrique fixée à 2% ». Les écarts négatifs et positifs par rapport à l’objectif sont ainsi « également indésirables », a déclaré la BCE. Historiquement, l’inflation dans la zone euro a plutôt été inférieure à 2%, que proche de ce chiffre.
Toutes les économies ne peuvent pas se permettre d’être aussi détendues face au risque d’inflation. Dans une partie des économies émergentes, avec un passé d’inflation volatile, les banquiers centraux craignent un cercle vicieux de dépréciation des devises et d’inflation toujours plus élevée, alimentant les attentes d’inflation et sapant la confiance des consommateurs et des investisseurs. Ceci dit, la différence aujourd’hui est que, depuis deux décennies, la politique des banques centrales émergentes est devenue beaucoup plus crédible.
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