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Nous allons évoquer aujourd’hui une configuration économique que l’on croyait oubliée depuis longtemps : la stagflation. De quoi s’agit-il ? Faut-il s’en inquiéter ? Que faire ? Voilà le programme de ce billet…
La stagflation, c’est quoi ?
À la suite des travaux d’Alban William Phillips de 1958, les économistes pensaient que chômage et inflation étaient négativement liés entre eux, c’est-à-dire qu’une hausse du taux de chômage allait de pair avec une inflation modérée :
[ Source : Wikipédia ]
De là découlait une prescription de politique économique : il faut choisir entre lutter contre l’inflation ou lutter contre le chômage, comme si l’État ne pouvait actionner qu’une seule manette à la fois. Puis, dans les années 1960 au Royaume-Uni et dans la décennie suivante en France, on vit apparaître une situation économique surprenante caractérisée par la stagnation de l’activité économique (donc faible croissance et chômage élevé) et une hausse généralisée des prix. À situation nouvelle, mot nouveau : stagflation (contraction de stagnation et inflation) !
L’inflation aux États-Unis et dans la zone euro
Selon Eurostat, en janvier, le taux d’inflation annuel de la zone euro s’est établi à 5,1 % en janvier 2022, contre 0,9 % un an auparavant. Dans le détail, alors que le taux annuel d’inflation annuel était de 3,3 % en France, 4,5 % en Autriche et 5,1 % en Allemagne, il était de 7,6 % aux Pays-Bas et de 8,5 % en Belgique.
[ Source : Eurostat ]
Mais lorsque l’on regarde les principales composantes de l’inflation dans la zone euro, c’est l’énergie qui arrive très largement en tête :
[ Source : Eurostat ]
Aux États-Unis, l’inflation dépend certes pour une part des prix de l’énergie, mais elle résulte aussi d’une forte hausse des salaires et des prix de production des entreprises.
[ Source : Direction générale du Trésor ]
Mais que ce soit aux États-Unis ou dans la zone euro, l’activité est plutôt en berne après le vif rattrapage de l’année passée :
[ Source : FMI ]
Que faire contre la stagflation ?
Il y a quelque temps, j’avais expliqué dans un billet que l’inflation n’est pas forcément une mauvaise chose, pour peu qu’elle reste contenue. D’ailleurs, comme l’inflation dans la zone euro résulte avant tout de l’évolution des prix de l’énergie, il serait malvenu de passer à une politique monétaire trop restrictive. En effet, qu’on le veuille ou non, nos économies restent très dépendantes du pétrole et restreindre l’accès aux liquidités n’arrangerait en rien la situation.
Le point nodal est que l’inflation est avant tout un rapport social. Or, le pouvoir de négociation des salariés concernant le partage des revenus est devenu structurellement faible dans la zone euro. Ce sont donc les éventuels effets de second tour qu’il faut surveiller, c’est-à-dire les éventuelles hausses de salaire liées à la hausse des prix à la consommation. En effet, l’inflation suppose une hausse généralisée et autoentrenue des prix à la consommation. Et pour l’instant, dans la zone euro, si l’on observe des effets de second tour sur la production (hausse des coûts de production liés à des hausses de prix des intrants), rien de tel n’est vraiment visible du côté des salaires. En revanche, aux États-Unis, ces effets de second tour sont bien présents :
[ Source : Natixis ]
La Banque centrale des États-Unis (Fed) cherche dès lors à lutter contre l’inflation en évoquant une augmentation prudente de ses taux directeurs, car la croissance n’est pas au beau fixe et les incertitudes nombreuses. Il existe donc un risque d’étouffer la croissance et de précipiter l’économie en récession des deux côtés de l’Atlantique. D’où les réticences des banquiers centraux à resserrer trop tôt et trop vite la politique monétaire, malgré les cris d’orfraie de ceux qui possèdent le plus de patrimoines, alors qu’ils ne sont pas les plus à plaindre : que dire de ceux qui n’ont que leur modeste salaire et subiront également un ralentissement ou une récession économique (perte d’emploi, précarisation de l’emploi, diminution de rémunération totale…), comme je l’ai montré dans cet article ?
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