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Dans tous les pays développés, l’État aide les entreprises forcées de réduire ou d’arrêter leur activité et les ménages les plus vulnérables. L’inquiétude de la hausse de l’endettement grandit.
La facture n’a pas fini de s’alourdir. En France, le 18 mars, dans un projet de loi de finances rectificative pour 2020, le gouvernement prévoyait un recul du PIB de 1% en 2020. Moins d’un mois après, le 15 avril, il a dû présenter le projet d’une deuxième loi de finances rectificative reposant cette fois sur un recul du PIB de 8%, du jamais-vu dans l’histoire contemporaine. La différence s’explique par la longueur de la période de confinement et par les incertitudes entourant la reprise de l’activité au-delà de cette période. En conséquence, le coût estimé du plan d’urgence de soutien à l’économie s’envole: il passe de 45 milliards d’euros à 110 milliards.
La loi de finances initiale prévoyait un déficit budgétaire de 93,1 milliards. Avec la première loi de finances rectificative, le chiffre est monté à 109 milliards. Il atteint maintenant 183,5 milliards. Cette dégradation est le résultat de deux évolutions négatives qui cumulent leurs effets. D’une part, une baisse des recettes fiscales attendues, notamment au titre de l’impôt sur les sociétés et de la TVA; par rapport à la prévision initiale, le recul atteint 42,7 milliards. D’autre part, la hausse des dépenses inscrites dans le plan d’urgence. Mais l’addition pourrait grossir encore pour trois raisons.
D’abord, il n’est pas exclu que les dépenses dites d’urgence soient revues à la hausse au cas où la situation se détériorerait plus profondément. Ensuite, l’État a prévu d’accorder sa garantie aux prêts que les entreprises pourraient être contraintes de demander à leurs banques pour faire face à leurs besoins de trésorerie, et cela pour un montant total de 300 milliards; si certaines de ces entreprises se retrouvent dans l’incapacité de rembourser ces prêts, la garantie jouera. Enfin, il sera peut-être nécessaire plus tard dans l’année, après le plan de soutien, de bâtir un plan de relance.
Forte hausse du montant des emprunts d’État
En tout cas, il est d’ores et déjà acquis que l’État devra emprunter plus sur les marchés financiers qu’il ne comptait le faire. L’Agence France Trésor, qui gère la dette publique, a relevé son programme d’émission d’emprunts à moyen et long terme; de 205 milliards initialement prévus, on est passé à 245 milliards.
Cette vigoureuse intervention de l’État, au prix d’une forte dégradation des finances publiques, n’est guère contestée: l’ensemble des responsables politiques admettent qu’il fallait agir vite et fort. L’opinion publique l’admet aussi. Les seules vraies critiques viennent de celles et ceux qui estiment ne pas être assez aidés ou craignent de ne pas être aidés du tout (au fil des semaines, le dispositif s’est renforcé et élargi, mais des entreprises et des indépendant·es risquent malgré tout de se retrouver en très grande difficulté).
Il n’en demeure pas moins que cette pluie de milliards déversés sur l’économie soulève quelques interrogations. Certaines voix ironisent sur cet empressement de l’État à intervenir en faveur des entreprises, alors qu’il y a quelques semaines encore il était bien difficile d’obtenir quelques millions, voire quelques centaines de milliers d’euros pour le secteur hospitalier, l’Éducation nationale, la Justice, etc. D’autres s’inquiètent pour la suite des événements: tous ces milliards qu’il faudra rembourser, qui les paiera?
Record mondial des dépenses publiques
Ces interrogations ne peuvent trouver de réponse si l’on considère le cas de la France isolément, avant l’épidémie de Covid-19 et maintenant. Il faut replacer sa situation financière dans le contexte international. Pour cela, nous utiliserons les chiffres du FMI dans son dernier Moniteur des finances publiques, publié le 15 avril. On y voit que la France était en 2019 le pays développé où les dépenses publiques (État, collectivités locales, sécurité sociale) étaient les plus élevées, à 55,8% du PIB, devant la Finlande (53,2%), la Belgique (51,9%) et le Danemark (51,4%), seuls ces quatre États consacrant plus de la moitié du PIB à la dépense publique.
Fort logiquement, puisqu’il faut bien que ces dépenses soient financées, on retrouve la France parmi les pays où les recettes publiques sont le plus élevées, mais en troisième position, à 52,8% du PIB, derrière la Norvège (57,8%) qui dépense moins mais épargne beaucoup pour préparer le jour où ses recettes pétrolières disparaîtront, et le Danemark (53,6%).
Les recettes ne couvrant pas les dépenses, la France a enregistré en 2019 un déficit public de 3% du PIB. À ce niveau, elle se situe exactement dans la moyenne mondiale des pays développés et certains pays enregistrent des chiffres nettement plus élevés: c’est en particulier le cas des États-Unis avec un déficit public de 5,8% du PIB. Mais la comparaison avec les autres pays européens lui est nettement moins favorable: dans la zone euro, la moyenne s’élève à seulement 0,7% du PIB. Nos partenaires respectent beaucoup mieux que nous le Pacte de stabilité et de croissance.
Dette publique élevée
Les déficits publics s’accumulant (le budget de l’État n’a jamais été équilibré au cours des quarante dernières années), la France a une dette publique élevée: 98,5% du PIB en 2019 selon le FMI (d’après les derniers calculs d’Eurostat, on était à 100,5% du PIB à la fin de septembre 2019). Sur ce point, certains pays sont dans des situations encore plus inconfortables (le Japon à 237,4% du PIB, la Grèce à 179,2%, l’Italie à 134,8%, le Portugal à 117,6% ou les États-Unis à 109) et la moyenne des pays développés est à 105,2%. Mais la moyenne de la zone euro est seulement à 84,1%.
Tous ces chiffres conduisent à une conclusion très claire: les dépenses publiques de la France sont déjà très élevées et l’état de ses finances ne permet guère de les augmenter en période normale. Si un gouvernement cédait à toutes les revendications et laissait filer son budget, il se retrouverait très vite dans une situation doublement difficile: d’une part, il ne respecterait pas les engagements qui ont été pris au niveau européen avec nos partenaires de la zone euro; d’autre part, un gonflement du déficit inquiéterait les investisseurs qui souscrivent aux emprunts d’État lancés par la France et qui exigeraient alors des taux d’intérêt plus élevés.
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