Les banques centrales de retour à l’achat d’or ?

Depuis le début des années 2000, les banques centrales sont devenues des acheteurs majeurs du marché de l’or. Mais la crise sanitaire avait mis fin à ce mouvement. Aujourd’hui, il semble que les achats reprennent, ce qui pourrait constituer un support supplémentaire pour le métal jaune, relève notre chroniqueur Benjamin Louvet, gérant matières premières chez OFI AM.

Pendant plusieurs décennies, l’or a constitué la base des actifs de réserves des Banques Centrales. Mandatées pour éviter un recours systématique des États à la planche à billets à la moindre difficulté, leur rôle était de s’assurer que les gouvernements n’utilisent pas la dévaluation comme outil de gestion de crise. L’idée était ainsi que la monnaie soit en permanence convertible en or, ce qui obligeait les établissements centraux à avoir en permanence dans leurs coffres un stock de métal jaune équivalent à une part importante de la monnaie en circulation. Ainsi, en 1920, la Réserve Fédérale américaine devait, par ses statuts, avoir en permanence dans ses coffres une quantité d’or correspondant à au moins 40% de la monnaie en circulation. Le système a évolué vers l’étalon-or, avant d’être abandonné en 1971 avec la fin (officieuse) des Accords de Bretton Woods (la fin officielle interviendra en 1976 lors des Accords de la Jamaïque).

Depuis lors, les Banques centrales n’ont plus la nécessité impérieuse de conserver de l’or, cette obligation ayant été remplacée par un objectif d’inflation, afin de limiter la création monétaire. Les Banques centrales ont néanmoins conservé l’essentiel de leurs réserves d’or, afin de maintenir leur crédibilité et celle de leurs monnaies. Toutefois, au gré des difficultés rencontrées par les pays, certaines d’entre elles ont occasionnellement vendu une partie de leurs réserves de métal jaune. Cela s’est soldé par des ventes régulières de l’ordre de 400 à 600 tonnes par an dans les années 90 et au début des années 2000.

La mondialisation et la hausse des cours de l’or ont alors inversé le mouvement. Ainsi, la forte progression des cours de l’or dans les années 2000 (l’once est passée de 280 dollars à plus de 1900 dollars entre 2000 et 2011) a poussé les Banques centrales à réduire progressivement leurs ventes, jusqu’à les ramener à zéro en 2006-2007.

Dans le même temps, la mondialisation a entraîné une très forte hausse de la balance commerciale des pays émergents. Progressivement, afin de diversifier leur risque, les Banques centrales de ces pays se sont mises à acheter de l’or. On a alors opéré à une bascule au début des années 2010 : les banques centrales des pays développés ont arrêté leurs achats, et les banques centrales des pays émergents sont devenus acheteuses. On est ainsi passé d’une situation où les Banques centrales (essentiellement dans les pays développés) vendaient 400 à 600 tonnes d’or par an, à une situation où elles en achètent 400 à 600 tonnes par an (essentiellement les banques des pays émergents). Les Banques centrales ont ainsi acquis plus de 650 tonnes d’or par an en 2018 et en 2019, un record depuis la fin des Accords de Bretton Woods.

La crise sanitaire a mis partiellement fin à ce mouvement. Nombre de banques centrales ont ainsi annoncé au début de la pandémie, l’arrêt de leurs programmes d’achat de métal jaune, afin de conserver des marges de manœuvre dans la gestion de la crise sanitaire. Les établissements centraux n’ont ainsi acquis que 273 tonnes d’or en 2020.

Dès lors se pose la question de savoir si cet arrêt est temporaire ou relève d’un changement de stratégie. Les derniers développements font plutôt pencher la balance en faveur de la première hypothèse. En effet, après un trimestre sans aucun achat de la part de ces établissements entre juillet et septembre 2020, les Banques centrales sont progressivement revenues à l’achat. Elles ont acquis près de 80 tonnes au quatrième trimestre 2020, et un peu plus de 95 tonnes au premier trimestre de cette année, en ligne avec les achats observés pour le premier trimestre en 2016 et 2017. Le plus gros acheteur a été la Hongrie qui, avec 63 tonnes acquises, a triplé ses réserves de métal, dans ce qui constitue le plus gros achat d’or mené par une Banque centrale depuis 2019.

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