PIB à -13,8% : trou d’air ou crash économique ?

La France vient de connaître une chute historique de son PIB au deuxième trimestre de cette année (-13,8%). La France pourra-t-elle surmonter cette épreuve rapidement ? Les effets du confinement et de la crise du coronavirus vont-ils marquer durablement l’économie et la société françaises ?

Atlantico.fr : Au deuxième trimestre 2020, la France subit une chute historique de 13,8% de son PIB. Pensez-vous qu’il est possible que la France, avec quelques plaies, s’en sorte assez rapidement ? Ou au contraire, que l’effet confinement et coronavirus la marquera pour des années voire des décennies ?

Michel Ruimy : Dans cette crise sanitaire, il y a deux phases. La première a été la mobilisation d’urgence des autorités publiques – comme d’ailleurs dans les autres pays occidentaux – pour faire face à une crise inédite sévère. Il y a eu un bouclier public, coûteux mais nécessaire. Aujourd’hui, nous ne savons pas si l’État pouvait tout mais il a fait énormément. La seconde est la stratégie de reconstruction dont certains éléments nous seront donnés fin août. Mais, il faut déjà prendre en compte que l’État ne peut pas tout faire et surtout ne doit pas faire seul. Cette phase est nécessairement différente dans la mesure où les bons choix doivent être arrêtés : l’argent public n’est pas illimité. Le « quoi qu’il en coûte » doit progressivement laisser la place à un « quand cela vaut le coup », plus sélectif.

La France a besoin de mesures de relance ciblées, sélectives, bien choisies. Mais plus encore que de mesures de relance, notre pays a besoin d’un pacte de confiance avec les acteurs privés (ménages, entreprises) qui sont les premiers moteurs de la reprise. Il faut passer aujourd’hui du bouclier public à la confiance privée. Il s’agit de la confiance des ménages pour qu’ils mobilisent leur épargne accumulée pendant la crise. Près de 100 milliards d’euros à la fin de l’année, soit l’équivalent de 4 points de réservoir de croissance ! Il s’agit aussi la confiance des entreprises pour qu’avec leurs fonds propres – leur capital -, ils puissent investir.

Voilà ce qui est absolument clé pour réussir la reconstruction dans un contexte de stabilité fiscale (ni hausse, ni baisse d’impôts). Les gages donnés sur le maintien de l’assurance chômage à son niveau actuel contribuent à redonner confiance, de même que les initiatives en faveur de l’emploi des jeunes et de l’apprentissage. Pour éviter que cette épargne exceptionnelle ne se transforme en épargne de précaution, redonner confiance est l’un des plus grands enjeux. Pour les entreprises aussi.

Que peuvent nous indiquer les premiers éléments de l’INSEE ? Devons-nous nous attendre à une courbe en U, W, L ?

Une fois que la crise sanitaire sera, à peu près, réglée, à quel scénario économique peut-on s’attendre ? Les économistes ont débattu longuement sur la lettre qui illustrait le mieux la forme de la reprise. Ils ne sont pas tous d’accord.

Certains voyaient une reprise en V (Chute brutale de l’économie puis une reprise tout aussi violente). Ce rebond résulterait du rattrapage du retard de consommation et des mesures d’aides et d’incitation. Nous avons une certitude : ce ne sera pas un V. La reprise est molle malgré les milliards déversés par les banques centrales et les gouvernements. Concernant le U (Fort ralentissement de l’économie suivi d’une période de flottement correspondant à la barre horizontale du U). Un flottement lié à la remise en marche progressive de l’activité économique mondiale, un peu grippée après quelques semaines d’arrêt d’autant que la sortie du confinement ne se fera que par étapes. C’est un scénario plausible à la condition qu’un remède au virus soit trouvé rapidement. Pour le L (Chute brutale suivie d’une longue période de stagnation). C’est un mauvais scénario avec une accumulation de mauvaises nouvelles. C’est un scénario à ne pas espérer. L’évoquer, c’est déjà mauvais pour le moral. Le W (Rebond vigoureux après une chute brutale mais après l’euphorie, des incertitudes dues à un redémarrage lent de l’économie, à un commerce international perturbé du fait d’un repli sur soi des Etats… apparaît. L’économie se déprime mais elle redémarre d’encore plus belle). Dans ce scénario, même le rattrapage est mou. Après deux mois d’abstinence, la consommation, au lieu de repartir, est atone. Elle ne compense pas les « privations » antérieures du fait vraisemblablement d’inquiétudes (deuxième vague par exemple).

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