Cinq questions et deux graphiques pour comprendre la crise en Argentine

Les vieux fantômes des années 2000 reviennent hanter l’Argentine qui vient d’être en faillite pour la neuvième fois de son histoire. La devise s’effondre, le contrôle des capitaux et des changes sont réintroduits, le pays n’arrive plus à rembourser ses échéances de dette. Voici quelques éléments pour mieux comprendre la situation financière de l’Argentine.

Les Argentins se sont rués vers les bureaux de change pour échanger leurs pesos contre des dollars. (RONALDO SCHEMIDT/AFP)

Comme au début des années 2000, les files d’attente devant les distributeurs de billets sont redevenues courantes en Argentine. Cette ruée vers le cash fait suite à une série de mesures prises par le gouvernement de Mauricio Macri afin d’enrayer la crise qui s’est abattue sur le pays depuis quelques semaines.

1- Que se passe-t-il sur les marchés argentins ?

Le peso argentin a perdu près de 60 % face au dollar depuis le début de l’année et près de 30 % depuis le début du mois d’août . Il faut désormais 58 pesos pour obtenir un dollar, contre moins de 40 en janvier. Du coup, les Argentins se pressent aux guichets et aux distributeurs pour changer leurs pesos restants en dollars et éviter de voir leur pouvoir d’achat partir en fumée.

Après avoir passé de longues années coupée des marchés financiers, l’Argentine est retournée lever de l’argent auprès d’investisseurs internationaux qui se sont montrés friands. Le pays a notamment émis une obligation à 100 ans avec un coupon de 7,125 % en 2017. L’enthousiasme des investisseurs a toutefois été de courte durée, ce papier ne vaut plus que 38 % de sa valeur nominale.

Quant à la Bourse de Buenos Aires, elle a reculé de 48 % sur un mois, elle a ainsi touché son plus bas depuis août 2017. De manière contre-intuitive, l’indice Merval progresse certains jours car la chute du peso se révèle favorable à certaines sociétés exportatrices cotées à Buenos Aires.

2- Qu’est-ce qui a mis le feu aux poudres ?

En amont des élections en octobre prochain, un vote préliminaire s’est tenu le 11 août dernier. Dans les urnes le libéral Mauricio Macri a essuyé une défaite au profit de l’opposition emmenée par Alberto Fernandez, faisant craindre le retour des « populistes » façon Kirchner. Ces craintes ont déclenché une ruée vers le dollar et donc une chute du peso argentin. Comme la devise se déprécie à un rythme effréné, le poids des remboursements de la dette libellée en dollar s’alourdit tout autant.

3- Comment en est-on arrivé là ?

Mauricio Macri a pris le pouvoir en 2015 et voulu tourner la page des années Kirchner marquées par une économie fermée et étouffée par le contrôle des capitaux, des changes et de larges subventions ainsi que par des finances publiques sous pression en raison de programmes sociaux de grande ampleur. Au début tout s’est passé à peu près comme prévu, mais la situation s’est dégradée.

Le gouvernement a notamment rencontré des difficultés pour réduire son déficit budgétaire, car il n’a pas souhaité réduire à zéro les programmes sociaux du jour au lendemain. Du coup, il a comblé le trou en s’endettant. Par ailleurs, les prix de l’énergie et des transports, moins subventionnés, se sont envolés ravivant les démons de l’inflation (25 % en 2017 et près de 50 % en 2018).

A cela, il faut ajouter une production agricole en forte baisse après des aléas climatiques défavorables en 2018 . L’agriculture est l’une des principales sources d’exportations permettant de faire entrer des devises étrangères et facilitant le paiement de la dette en dollar. Enfin aux Etats-Unis, la hausse des taux en 2018 ainsi que l’appréciation du billet vert ont mis sous pression le peso argentin.

Pris à la gorge, le gouvernement a sollicité un prêt au Fonds monétaire international (FMI) contre l’avis de sa population. Le fonds a accordé environ 55 milliards de dollars de crédit pour accélérer les réformes et passer le cap du déficit budgétaire.

Inflation galopante, baisse des programmes sociaux, retour du FMI, dépréciation du peso, croissance laissant à désirer, exportations moribondes… Le bilan de Macri n’est pas à la hauteur des espérances. D’où une sanction dans les urnes et désormais des investisseurs internationaux effrayés par le retour des populistes.

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