Ces dernières semaines, nombreux ont été les signes témoignant d’une tentative de reprise en main des problèmes liés à certains assureurs en libre prestation de services (LPS). Plusieurs autorités de régulation ont ainsi tapé sur la table, face à ces sociétés dont beaucoup sont largement intervenues dans l’assurance-construction ces dernières années, sans pour autant avoir les reins assez solides pour assurer sur le long cours les risques couverts. Ainsi, l’ACPR, gendarme français des assurances, a récemment sanctionné Elite insurance (société basée à Gibraltar, depuis placée en liquidation) ; l’autorité irlandaise, de son côté, vient d’interdire à CBL insurance Europe de payer les sinistres ; la pression mise par le régulateur danois sur Gefion (société n’intervenant pas dans le secteur de la construction, mais bien en libre prestation de services) constituant un autre signal…

L’ACPR a passé un message au marché

« Nous assistons probablement à une reprise en main par l’Union européenne du marché de l’assurance construction en libre prestation de services (LPS) », espère l’avocat Stéphane Choisez, contacté par Batiactu. Bien sûr, la sanction de l’ACPR contre Elite était toute symbolique dans la mesure où cet assureur ne souscrivait plus de risques depuis deux ans et demi. Mais l’autorité a envoyé un message au marché. « Elle a montré qu’elle avait la possibilité de sévir sur une société basée dans un autre pays de l’espace économique européen », explique l’avocat, qui n’exclut pas que d’autres entités soient épinglées dans les mois à venir. « Nous assistons à la fin des excès d’un système de la LPS auquel je suis d’ailleurs favorable, dans la mesure où les règles ne sont pas faussées. »

Tous les acteurs ne sont pas forcément aussi optimistes. « La pression augmente gentiment », reconnaît un connaisseur du sujet. « Il est certain qu’il y a beaucoup plus d’échanges entre les régulateurs. Mais je ne parlerais pas encore d’un assainissement du marché. »

Des démarches complexes et peu susceptibles d’aboutir

Un point semble faire l’unanimité : les autorités de régulation se réveillent un peu tard. Pour preuve, sur le terrain, la situation est compliquée, et parfois même dramatique, comme le montrent des témoignages recueillis par Batiactu. Et la mise sous administration d’Elite a constitué un cruel rappel à la réalité pour des maîtres d’ouvrages particuliers qui avaient encore un vague espoir de revoir leur argent. Le scénario de ces naufragés de l’assurance construction est souvent le même : un entrepreneur disparaît dans la nature avant la fin des travaux, ou disparaît après avoir achevé des travaux non-conformes ; et, derrière, le maître d’ouvrage qui veut faire jouer l’assurance de l’acteur défaillant découvre que l’assureur en question est en situation financière difficile voire en liquidation. Comme ces entités sont basées à l’étranger, les démarches envisageables pour effectuer une demande d’indemnisation sont complexes et peu susceptibles d’aboutir à une issue favorable.