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Le métal jaune reste-t-il un actif intéressant pour se couvrir de l’inflation ? Faut-il en acheter alors que les taux remontent ? Nous avons posé la question à Vincent Boy, analyste de marché IG France et spécialiste des matières premières.
Avec l’inflation au plafond, on aurait pu s’attendre à ce que le cours de l’or explose les compteurs. A date, son rendement reste positif depuis le début de l’année, mais force est de constater que le métal jaune, réputé être l’actif de couverture anti-inflation par excellence, ne s’est pas non plus apprécié de façon spectaculaire.
Si avec la guerre en Ukraine, son cours s’est provisoirement rapproché de son record historique (2.052$ en mars), il a recorrigé depuis. Car entre la « normalisation » de la politique monétaire de la Fed et l’appréciation du dollar, dont il est inversement corrélé, l’or doit aujourd’hui composer avec certains vents contraires, nous explique Vincent Boy, analyste technique de marché chez le courtier IG France.
L’or est traditionnellement considéré comme un bon actif de protection contre l’inflation, par ailleurs décorrélé des marchés boursiers. Ce statut s’est-il confirmé depuis le début de l’année, avec l’explosion des prix à la consommation et la correction des indices ?
En effet, l’or est un actif de couverture. Comme il ne produit pas de rendement, il est considéré comme une protection contre l’inflation : quand les taux d’intérêt sont bas, les investisseurs se détournent des obligations qui leur rapportent peu au profit de l’or. Mais quand ces taux remontent, et qu’ils sont supérieurs à l’inflation* (on parle alors de taux réels positifs), comme actuellement, l’inverse se produit.
Depuis le début de l’année, l’inflation est bien montée, et pour autant l’or a chuté, car il a été tributaire de ces taux d’intérêt obligataires, qui sont liés à la politique monétaire, et qui ont fait s’apprécier le dollar américain.
Avec les mouvements des taux et du dollar, le cours de l’or est demeuré hésitant ces derniers mois. Il est d’abord fortement monté au début de l’année, au moment où les taux d’intérêt réels américains ont baissé, puis il a chuté quand ces taux réels sont redevenus positifs.
Avec un once un peu au-dessus de 1.850$, actuellement, le rendement de l’or reste cependant positif en year-to-date, alors que les marchés actions restent dans le rouge (-15% environ pour le CAC 40 ce lundi 13 juin, NDLR).
Mais c’est vrai que son rôle d’actif de couverture a été un peu mis en mal ces derniers temps, en particulier parce que l’inflation a longtemps été présentée, à tort, comme un phénomène « transitoire ». Et sur du court terme, les investisseurs lui ont préféré les obligations.
Comment voyez-vous son cours évoluer dans les prochains mois ?
Les politiques de resserrement monétaire des banques centrales sont en marche, ce qui est plutôt négatif pour l’or à court terme. Mais je vois mal la Fed augmenter ses taux d’intérêt jusqu’à la fin de l’année. Si l’or pourrait rester sous pression dans les mois à venir, il n’est pas exclu que Jerome Powell, le président de la Banque centrale américaine, amorce une pause dans la hausse des taux face au ralentissement de l’économie américaine, ce qui permettrait à l’or de rebondir.
A moyen terme, si l’essoufflement économique mondial s’accentue, avec une performance moindre des marchés actions, et que l’on se retrouve en situation de stagflation, combinaison d’une croissance faible ou nulle avec une forte inflation, on peut tout à fait imaginer qu’il dépasse son plus haut historique (atteint en août 2020, à 2.063$ l’once, selon les données Eikon/Refinitiv, NDLR).
Les spécialistes de l’investissement financier recommandent en général de consacrer à cet actif environ 10% de leur portefeuille. Est-ce que ces recommandations d’allocation sont à reconsidérer en période de crise, avec l’inflation et le risque de stagflation ?
La composition d’un portefeuille doit en effet s’adapter au contexte de marché. Quand les actions fonctionnent bien par exemple, il n’est pas forcément nécessaire de consacrer autant à une valeur refuge. Mais en période de crise, cette allocation de 10% paraît en effet tout à fait pertinente. Surtout dans l’hypothèse d’une situation de stagflation, l’or reste un excellent actif refuge.
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