Hélicoptère-monnaie de la Fed contre bazooka monétaire de la BCE

Où va tomber le prochain argent gratuit ? Allez-vous pouvoir en profiter un peu, comment ? Réponses dans la conférence de Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne.

La Banque centrale européenne a fort à faire. Suite aux annonces de la Federal Reserve américaine, à la reprise des cours du pétrole et à la publication de quelques chiffres d’inflation en hausse, les taux d’intérêt se sont un peu tendus dans l’Eurozone ces dernières semaines. Or le volume de dettes est tel que toute augmentation des taux conduirait à une spirale de faillite et les dernières mesures de la Fed pourraient effectivement réveiller les prix et donc les rendements obligataires.

Car la Fed poursuit sa politique d’hélicoptère-monnaie engagée sous l’ère Trump. Rappelons le principe : l’argent gratuit est distribué directement dans la poche des gens. Pour y avoir droit, il suffit d’avoir moins de l’équivalent de 80 000 $ annuels de revenus et la nationalité américaine ; où que vous résidiez dans le monde votre chèque vous sera envoyé. Rappelons que les États-Unis pratiquent la taxation par la nationalité. Vous devez donc déclarer vos revenus à l’IRS qui sait où vous adresser votre chèque.

Voici à quoi ressemble un chèque de la Banque centrale américaine

Celui-ci est d’un montant de 600 $ et date de l’ère Trump. Son heureux récipiendaire attend ceux de Biden.

Je précise une chose : l’argent gratuit n’existe pas. Prétendre que fabriquer de la monnaie améliore l’économie revient à croire que fabriquer des boites à chaussures va augmenter la production de chaussures. La monnaie est un moyen d’échanger des produits et services dont la quantité vendue représente la richesse. Ce n’est pas parce que vous injectez de la monnaie qu’il y a comme par magie plus de produits et services existants. Si vous croyez le contraire, je vous conjure d’arrêter votre lecture ici. Lisez plutôt les Comptes du chat perché ou encore le Traité sur la Monnaie de Keynes si vous êtes d’humeur badine.

Contrairement à la Fed, la Banque centrale européenne, elle, en reste à ses bonnes vieilles méthodes : rachat d’obligations contre de l’argent frais distribué, tout transitant par le système financier. Les banques sont censées redistribuer l’argent frais via de nouveaux prêts.

Le PEPP va péter tous les plafonds

Le dernier tour de passe-passe monétaire de la BCE se nomme PEPP (Pandemic Emergency Purchase Program). Avec 500 Mds€ en mars 2020 puis 600 Mds€ en Juin et 500 Mds€ en décembre, c’est le plus gros bazooka monétaire. Les munitions seront tirées jusqu’en juin 2021. Et il faut bien constater, comme le montre le graphique ci-dessous, qu’à côté de ces bazookas de gros calibre mis en place par Christine Lagarde, Mario Draghi était un petit Mickey (avec ses LTRO, TLTRO, APP, PSPP pour ceux qui sont friands d’acronymes, tout ceci étant des variantes de QE ou Quantitative Easing).

Bilan de la Banque centrale européenne • (En rouge) Titres détenus à des fins de politique monétaire • (En bleu) Prêts aux institutions financières • (En grisé) Autres

En gros, nous en sommes à plus de 6 000 Mds€, soit environ la moitié de la valeur de l’économie de la zone euro injectée depuis la crise financière de 2008. Bien entendu, la croissance du PIB ne fut pas de 50%. En fait, le PIB n’a jamais retrouvé son niveau de 2008. La quantité de boites à chaussure a augmenté de 50% mais la quantité de chaussures produite est en légère régression… Mais qu’à cela ne tienne, faisons plus fort !

Dans sa conférence du jeudi 11 mars, Christine Lagarde a dit et répété (jusqu’à la nausée, croyez-moi, je l’ai écoutée en direct) qu’il fallait maintenir des « conditions de financement favorables ». Elle nous a laborieusement expliqué que la BCE allait observer ce qui se passait dans tout le spectre obligataire : des obligations d’État sans risque (sans rire, elle a dit « risk free ») aux autres obligations du marché. Le bout du spectre comprend tous les titres émis par les zombies financiers (dont les banques), les collectivités locales, les grandes entreprises publiques et parapubliques, les organismes sociaux. Bref, toutes les créances les plus pourries seront reprises, la BCE ne sera pas regardante. Pour un habillage convenable (car l’Union européenne, ce n’est pas le Zimbabwe, l’Argentine ou le Venezuela, n’allez surtout pas croire ça), Christine Lagarde nous a précisé qu’il y aurait une approche « holistique » et « multifacette ». Son explication du terme holistique était incompréhensible. En ce sens, elle a appris du maître Greenspan – qui avait déclaré un jour: « Si quelqu’un a compris quoi que ce soit à ce que je viens de dire, c’est que je me suis mal exprimé »! Elle a aussi indiqué qu’il restait encore 1 000 Mds$ dans son enveloppe PEPP que tout ne serait pas dépensé si ce n’était pas nécessaire mais que l’enveloppe serait « recalibrée » en cas de besoin. Elle est pas belle, la vie des zombies ?

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