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L’emploi industriel représente 11,7% de l’emploi en France.
La désindustrialisation de la France est un processus ancien et qui a longtemps été considéré comme dans « l’ordre des choses ». Un pays qui se développait était, en effet, supposé passer de l’agriculture à l’industrie et de l’industrie aux services. Telle a été, jusqu’à il y a peu, la croyance dominante, véhiculée par des économistes tant étrangers (Colin Clarck) que français (Jean Fourastié).
À quelques exceptions près (parmi lesquelles Jean-Pierre Chevènement et Arnaud Montebourg), rares sont les hommes d’État qui, en France, auront alerté quant aux conséquences néfastes du déclin de l’industrie. Et il aura fallu bien du temps pour s’apercevoir que les pays qui parvenaient soit à croître (la Chine ou encore certains autres pays asiatiques), soit à affirmer leur rôle de leader (l’Allemagne) parvenaient à le faire en développant leur industrie. A l’inverse, les pays dont le leadership est désormais contesté (les Etats-Unis) ou qui se débattent dans de très grandes difficultés (la majorité des pays africains ou latino-américains ainsi qu’en Europe, un pays comme la Grèce) n’ont pas réussi à maintenir sur leur sol ou à développer des activités industrielles conséquentes.
Qu’en est-il de la France ?
La réponse tient en quelques chiffres.
En 1974, l’industrie française employait 5 millions de salariés en équivalents temps-plein. Fin 2016, ce nombre n’est plus que de 2,7 millions, soit une perte de 2,3 millions d’emplois directs. Durant la même période, l’ensemble de l’économie a employé 6 millions de personnes de plus. Résultat : la part de l’emploi industriel dans l’emploi total a régressé de 29 % à 11,7 %. Alors que la part de l’industrie dans la valeur ajoutée nationale en France s’élevait à 23% en 1974, elle n’est plus que légèrement supérieure à 11% en 2016. Cette dernière année, cette part est de 23% en Allemagne et de 17% en Italie(1).
La France, sixième puissance économique mondiale, est désormais un pays devenu extrêmement dépendant de ses importations. Comme l’a bien montré Natixis(2), en cas de choc (bien improbable !) de la demande, près des deux tiers de la demande supplémentaire se porteraient aujourd’hui sur des biens et services importés.
Cette dépendance touche tous les domaines :
les biens d’équipement professionnels, c’est-à-dire les machines dont s’équipent les entreprises lorsqu’elles investissent
les biens dits « intermédiaires », c’est-à-dire les achats que réalisent les entreprises qui veulent produire des biens finals. Par exemple, les « principes actifs » qu’achètent les entreprises pharmaceutiques qui veulent produire des médicaments, principes (comme le paracétamol) fabriqués quasi-totalement par des pays comme la Chine ou l’Inde
les biens d’équipement des ménages, y compris l’automobile (acheter une voiture « française » ne signifie plus qu’elle est produite en France)
les biens de consommation finale, comme les vêtements.
Avec la crise du Covid 19, les Français ont constaté que des biens industriels de base –comme les masques ou même, pendant un long moment, le gel hydroalcoolique- non seulement manquaient mais encore qu’il fallait les importer dans des conditions souvent difficiles et prenant du temps. Si le système de santé allemand a moins souffert des politiques d’austérité que le nôtre (et encore moins que ceux des pays d’Europe du Sud), il ne fait nul doute que la capacité de l’industrie allemande à fournir les matériels divers en temps voulu explique, pour une part, les stratégies différentes suivies par les autorités sanitaires (par exemple, en matière de dépistage) et, surtout, les très fortes différences constatées dans le nombre de décès. Il n’est donc pas exagéré de considérer que la crise sanitaire aura joué comme un révélateur macabre de la défaillance industrielle française.
Si le déclin de l’industrie française vient de loin dans le temps (au moins trois décennies, voire davantage) et si ses causes sont complexes et nombreuses(3), alors il convient d’admettre que le processus de réindustrialisation ô combien nécessaire prendra du temps, d’où l’urgence de ne plus différer son engagement. Ne nous leurrons pas ! La réindustrialisation de grande ampleur dont la France a besoin ne se fera pas du jour au lendemain et il nous faudra du temps pour reconquérir notre souveraineté industrielle.
Que faire et comment pour réindustrialiser la France ?
Tout d’abord ne pas se tromper de cible ! Contrairement aux analyses et aux politiques qui en découlent, les entreprises françaises ne souffrent pas d’abord de coûts du travail trop élevés ou d’impôts trop lourds. Elles ne souffrent pas davantage d’une législation du travail qui serait trop contraignante. Sur l’ensemble de ces dimensions, les entreprises françaises sont dans une situation comparable à celle de leurs homologues allemands dont les performances sur leur territoire sont bien meilleures. Cela fera bientôt quatre décennies que les gouvernements français successifs n’auront eu de cesse d’imaginer des dispositifs pour que les entreprises (surtout les plus grandes d’entre elles) contribuent moins au financement des dépenses publiques et à celui de la protection sociale, ce sans effet sur l’emploi et l’investissement mais en faisant ainsi plaisir aux actionnaires et aux marchés financiers plébiscitant toujours les « allégements » ainsi consentis.
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